Axe 2 Histoire, mémoire et justice Intro : Réflexion sur liens entre Histoire, Mémoire et Justice (brainstorming) La justice peut avoir besoin de l’Histoire : présentation du contexte, du passé par rapport à une situation donnée La justice peut permettre de « réveiller » des mémoires, de ne pas les oublier... La justice fonctionne grâce à des témoignages, donc a besoin des mémoires PB : Comment œuvre la justice pour apaiser les mémoires et rétablir la paix lors de crime de masse ? 1. UNE JUSTICE DIFFICILE A RENDRE - Un nombre de victimes et de coupables hors du commun / justice conçue pour individualiser les peines en fonction de la responsabilité de chacun. une certaine lenteur (enquêtes, expertises, etc.), victimes se comptent par milliers voire par millions , les présumés coupables eux aussi très nombreux - Nature même des crimes jugés : contexte de guerre, encouragés voire ordonnés par un État qui a parfois utilisé la contrainte et/ou l'endoctrinement faire la part des choses entre la contrainte et le libre choix des différents acteurs des crimes jugés. (les accusés se déclarent innocents , affirmant avoir été forcés de commettre des crimes) - Situations jugées très complexes : violence et cruauté des crimes commis qui les rend difficiles à comprendre / les corps des victimes le plus souvent dissimulés , archives détruites par les criminels enquêtes difficiles et longues (preuves, témoignages) recourir à des TRIBUNAUX D'EXCEPTION composés de magistrats spécialisés les historiens peuvent jouer un rôle majeur et aider, par leurs travaux, les magistrats à décider : le TPIY fut le premier tribunal pénal international à recourir à des témoins dont l’h istorien britannique James Gow 2. LA JUSTICE A L’ECHELLE LOCALE : les tribunaux gacaca face au génocide des Tutsis (jalon 1) Quelle justice ? a. La justice ordinaire Une amnistie générale est rapidement écartée (contrairement à la pratique habituelle depuis 1963). La difficulté tient à l’envergure des procès à organiser dans un pays dont le personnel judiciaire manque. De plus, une loi doit être votée en 1996 pour poursuivre les crimes de génocide et contre l’humanité. Cette loi prévoit la catégorisation des crimes (en fonction des aveux) ainsi qu’une typologie : organisateurs, autorités, meurtriers de grand renom (défini p ar le zèle ou la méchanceté), violences sexuelles, tortures, homicides, pillages, ... En 2004, apparaissent 2 types de crimes : tortures et outrages aux cadavres. 1946 noms sont cités en 1996, à la hâte. En 1999, une liste revue contient 2133 noms. b. La justice traditionnelle Il est décidé de créer en 2001 les juridictions gacaca . Il s’agit de tribunaux traditionnels assurant une gestion locale des différends familiaux ou fonciers. 12000 sont créés en suivant le découpage administratif. Ils procèdent à la collecte d’information, à la catégorisation des accusés et au jugement (de toutes les catégories de criminels, avec le temps). Les procès se déroulent de 2005 à 2012. 2M de jugements sont prononcés pour 1M d’accusés. Les crimes sont jugés là où ils se sont déroulés. La mise en scène est minimaliste : bancs, table, écharpes aux couleurs nationales pour les juges et tenue rose pour les accusés incarcérés. Même si l’on veut donner une impression de justice au « ras du sol », il existe des liens avec la justice « ordinaire ». Le recours à l’écrit est très présent pour recueillir le témoignage des accusés, des victimes, du déroulement du procès, du verdict. L’oralité reste quand même importante, et l’importance de l’environnement (public jeune, qui assiste aux procès) joue sur l’ambiance. Le silence reste de rigueur. Les juges sont ceux qui parlent le plus (50%) puis les accusés (20%) et enfin le public (30%). Beaucoup de public au début, moins jusque 2009, date à laquelle ils jugent les accusés de 1 ère catégorie (et donc hausse du public). Critiques qui leurs sont faites : Culpabilisation collective des Hutu (mais % d’acquittements sont quand même élevés 37% sur les accusations de meurtres, ou violences physiques). 10% de la population (8M en 1994) a été condamné pour génocide. Tendance au non- respect des règles juridiques fondamentales (collecte d’informations à charge, absence d’avocats, ...) = instrument d’une réécriture de l’Histoire. Toutefois, les agents de l’Etat ne sont présents que dans 13% des procès. 3. LA CONSTRUCTION D’UNE JUSTICE PENALE INTERNATIONALE FACE AUX CRIMES DE MASSE - Dans l’esprit des tribunaux d’après - guerre, création du Tribunal Pénal International. C’est un « cadre », mais, pour chaque cas, un TPI particulier sera créé. Il travaille en enquêtant, auditionnant et jugeant (magistrats professionnels), et est dissous une fois le verdict énoncé pour le dernier accusé a. Le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) - 8 novembre 1994 (4 mois après la fin du génocide) : ONU institue (résolution 955) le Tribunal Pénal International du Rwanda (TPIR). - S’inscrit dans le cadre de la transformation de la justice internationale (fin de la guerre froide) qui se termine avec la création du CPI en 1998. - Il est installé en Tanzanie (Arusha) et débute son travail de jugement en 1997. Dernier procès en appel en 2015. 75 personnes jugées lors de 53 procès. Tous sont rwandais sauf un journaliste belge de la RTLM. b. le tribunal pénal internation al pour l’ex -Yougoslavie (TPIY) - Création par l’ONU (résolution spécifique) d’ un tribunal spécial en mai 1993 - Objectif = lutter contre l'impunité, c’est -à-dire juger et sanctionner les responsables ayant ordonné des massacres. - Les débuts du tribunal, installé à La Haye (Pays- Bas), sont difficiles. En effet les poursuites sont lancées alors que la guerre continue en ex- Yougoslavie (jusqu’en 1995), donc quand les crimes sont encore en train d’être commis. - Les premiers procès ne s’ouvrent qu’en 1996 - Lente à se mettre en place, activité du TPIY s'accélère à partir des années 2000. - Ses travaux ont duré jusqu’en 2017. CONCLUSION : - Les 3 notions sont interdépendantes : l’une nourrit l’autre. - La justice face aux crimes de masse peut s’effectuer à 2 échelles : nationale et internationale - Elle permet d’apaiser les Mémoires en ce sens qu’elle pose un verdict et définit les responsabilités de chacun, ce qui permet de « réparer », donc de construire la paix sur des bases plus sereines (utopie ???) - Les compte rendus des procès vont aussi servir de sources aux travaux des historiens