Incapable La violence appelle la violence. Peu importe sa nature ou la façon dont elle se matérialise, la violence est un mouvement. Elle change de forme, prend l’apparence d’une balle, d’un regard, d’une image, de coups, de mots, d’une lame, d’un livre ou de cris, elle n’est jamais figée. Elle se métamorphose et passe d’une forme à une autre en permanence, elle ne rentre dans aucune case. Ceux qui portent des gilet pare-balle tombent finalement sous les coups d’écrits. Ceux qui manient le verbe s’imaginent insensible au maux des mots, et oublient parfois la force que Dieu a placé dans les métaux. Penser l’ennemi en tant que système, nécessite d’abolir les frontières entre les violences et considérer que toutes les armes sont létales. Parce que si à un instant donné, des bureaucrates distinguent ce qui relève de la violence de ce qui n’en est pas, la violence elle, se moque bien de ces frontières artificielles. 28 Juin 2039 “ - Allez, à ton tour Aymen, après ça sera à toi Sylvain. - J’aime pas trop me confier on se croirait au cercles des alcooliques anonymes, dit Aymen. - Allez on est entre nous frérot, il y en a qui viennent d’intégrer l’ATD, ils te connaissent pas les nouveaux ! Lui rétorqua Maxime.” Aymen lâcha un sourir gêné à l’Homme en face de lui, son épaisse barbe laissa entrevoir l’espace d’une seconde ses dents, puis il commença. “ -Bon ben Aymen, 44 ans, célibataire. Heuu j’aime… pas grand chose, à part être ici avec vous, c’est vraiment quelque chose qui me fait plaisir. Je pense que je suis patient, et mon pire défaut… on m’a souvent reproché d’être insensible. Si je suis ici, c’est parce que de toute façon, je ne supporterai pas d’être ailleurs. Donc bienvenue. -C’est tout ? Demanda Maxime. Moi je te connais mais les autres veulent peut-être en savoir plus. -Ben je sais pas quoi dire d’autre hahaha… -La patience, très belle qualité masha’llah, il n’y a pas meilleur don de Dieu ! Lança Salim de l’autre bout du cercle. -Relève !! S’écria un homme à l’autre bout du camp. -Bon, on papotera plus tard, ordonna Maxime. Aller aller tout le monde en place on reprend son poste les frères ont bien bossé maintenant c’est à nous !” La petite troupe d’une quinzaine d’hommes se leva en vitesse. Chacun reprit son arme, accessoires nécessaires, et l’ensemble se dispersa aux quatre coins du camp pour relever celui son camarade à la surveillance. Le camp était construit de manière totalement improvisée, en rase campagne, entre une rivière et une forêt située à quelques kilomètres de leur campement. Maxime avait tenu à ce que cette position ne soit jamais abandonnée, car elle était selon lui et ses supérieurs, indispensable à la stabilité des lignes de défense. Le camp était construit à partir de tôles, d’amas de terres mis en place de manière circulaire par le seul bulldozer dont ils disposaient, et de sacs de sables qui servaient essentiellement à maintenir les entrées sécurisées. Aymen se dirigea avec Sylvain vers une mitrailleuse 12,7 qui surplombait un coin du camp. La position permettait d’avoir une vue directe de la partie Est et un observateur prévenait de toute tentative d’intrusion en provenance de la rive opposée du fin ruisseau qui passait à environ 200m de là. 9 Octobre 2024 Quinze ans plus tôt. " - Pourquoi tu est comme ça, pourquoi tu veux continuer ? Ça sert a rien tu vois bien… épouse quelqu'un d'autre tu sera plus heureux avec une autre. Laisse moi partir. -Je ne serais pas plus heureux avec une autre. Ça ne m'intéresse pas de rester avec une femme qui veut pas de moi, donc si tu veux pars je t'en empêcherai pas. Mais si tu veux tu peux rester aussi. -Pourquoi faire ?? J'ai besoin de quelqu'un qui m'aime et qui fasse attention à moi et tu en est incapable !!! A quoi ça rime de me loger, de me nourrir et m'acheter tout ce que je veux si t'es pas capable de passer du temps avec moi ?? -J'essaierai de passer plus de temps avec toi si tu veux. -Non ! Non je veux pas, on a déjà essayé Aymen. T'es toujours dans tes pensées tu m'écoute jamais même quand tu est avec moi. Il suffit qu'on t'appelle et tu décroches immédiatement ! -Je répond quand quelqu'un a besoin d'aide c'est pour… -Moi j'ai besoin d'aide moi !! J'ai besoin que mon mari soit autre chose d'un portefeuille et un hôtel ! C'est difficile de juste m'aimer comme un époux tendre et affectueux ? D'être à l'écoute de mes besoins ? -Désolé ça je n'y arrive pas..' c'est un de mes défauts. Mais ca veut pas dire qu’on peut pas être ensemble. Amina avait arrêté de hurler. Elle regardait fixement Aymen, resté de marbre face à la tempête qui s'abattait sur lui. Il répondait calmement, comme s'il discutait d'un sujet quelconque. " - Aymen…Est-ce que tu m'aime ? -Oui. -Tu mens. - Pourquoi ? - Parce que quand n aime quelqu’un on est émotif ! On prend du plaisir à être avec lui ! On l’embrasse on le caresse sans qu’il nous le demande ! -Je t’ai déjà dit que j’avais du mal à faire ça. -Alors pourquoi tu veux rester avec moi ??? -Parce que. -Parce que quoi ? -Comme ça. J’ai fait un choix. -Tu veux souffrir avec une femme que tu aime pas jusqu’à la fin de tes jours ?? -J’ai dit que je t’aimai. -Ca se voit pas ! J’ai l’impression d’avoir épousé un robot ! Et moi je n’en peux plus de ça !” Elle pleurait entre deux hurlements, désemparée face au manque d’émotivité du bloc de glace en face d’elle. Cette rupture émotionnelle lui pesait trop. Elle était incapable de prendre une décision et de se mettre d’accord avec celui qu’elle avait pris pour mari cinq ans plus tôt. Elle partirait c’était certain. Mais elle aurait voulu qu’il exprime une opinion cohérente avec son comportement, qu’il admette que leur union n’avait plus de sens et qu’il accepte d’y mettre un terme. Mais le comportement d’Aymen pour le moment lui était humainement incompréhensible. Tenter une autre approche donnerait peut-être quelque chose… Amina reprit ses esprits, essuya ses larmes, et parla calmement : “ - Imagine Aymen, on divorce, tu rencontre une femme qui te convient, que tu aime, qui n’aurait pas mes défauts. Avec qui tu peux passer des moments agréables et y prendre plaisir, avoir des enfants… -N’importe quelle femme aurait forcément d’autres défauts. Ca m’intéresse pas. -Tu vas faire quoi si on divorce ? Tu compte pas te remarier ? -Non, je serai incapable d’aimer quelqu’un d’autre après toi. -Aymen -Oui ? -Ca fait longtemps que tu es incapable d’aimer quelqu’un.” 29 Juin 2039 Le véhicule de transport blindé roulait à toute vitesse à la lisière de la forêt. Aymen opérait au canon 25 mm. L’objectif était de coller au plus près les lignes ennemies pour empêcher l’artillerie et l’unique hélicoptère adverse d’opérer sans risquer de tir ami. L’assaut avait été donné il y a une quinzaine de minutes. La chaleur étouffante de la journée s’était tout juste assez atténuée pour leur permettre de se déplacer sans fondre. La fumée rendait leur progression sur la route pleine de nids de poules et de lézardes encore plus risquée. Le conducteur du VBCI s'engagea brusquement dans un chemin de terre qui donnait sur la route. La troupe de trois véhicules pénétra la forêt avec une visibilité médiocre mais l’objectif était pour l’instant atteint : personne ne les avait pris en chasse. Quelques tirs de calibre 5,56 contre la carrosserie avait résonné lorsqu’ils étaient encore avec le groupe d’intervention principal mais à mesure qu’ils s'éloignaient, les tirs ennemis semblaient se concentrer sur les unités qui pénétraient frontalement la forêt. La diversion semblait fonctionner. Le véhicule s’arrêta brusquement. “ - Aymen, tu reste à la Tarask, Sylvain tu prend la 7.62 et tu nous couvres ! hurla Maxime. Sylvain et Ahmed vous protégez le véhicule, les autres on y va.” La troupe débarqua, accompagnée par les contingents des deux autres VBCI qui s’étaient arrêtés en même temps qu’eux. La forêt était dense, le feuillage épais rendait difficile la progression à pied mais les rendait également difficilement repérables. Aymen opérait à la tourelle du VBCI. Les tirs se faisaient entendre au loin mais ne les ciblaient pas directement. Il était sur le qui-vive. Sa visibilité était fortement diminuée par les troncs et le feuillage touffu, quelques chemins relativement fins étaient visibles au loin, ils représentait la source la plus probable d’où pourrait surgir un ennemi les ayant repérés. “ - On s’approche de la zone de combat, entendit Aymen à la radio. Maxime donnait les dernières instructions. On va activer les brouilleurs, retour au point d’extraction dans une heure tout le monde. Terminé.” A partir de ce moment précis, la communication radio ne fonctionnait plus. Ils ne pouvaient se permettre d’être repérés et devaient par conséquent renoncer à leurs propres communications pour empêcher les ennemis qu’ils croiseraient de prévenir leur base. Une trentaine d’hommes avançait à pas feutrés dans la forêt, pour l’instant tout se déroulait relativement bien, personne n’était repéré. Mais quelques minutes après le début du déploiement, une présence ennemie se manifesta. L’instinct d’Aymen ne l’avait pas trompé. A environ un kilomètre, un véhicule de type pick-up fit son apparition. Le canon de 25mm ne se fit pas prier. Aymen tira immédiatement sur le jeep qui embarquait une tourelle mitrailleuse, avant qu’elle ne puisse engager ses compagnon. L’objectif était double, permettre à ses camarades de progresser et signaler aux véhicules ennemis qu’un canon était proche, pour les tenir à distance et les forcer à rester cachés. La 7,62 tenue par Sylvain ne tarda pas non plus à faire entendre son chant meurtrier, elle ciblait un autre pick-up qui avait engagé le feu sur la troupe de Maxime. Le stratagème semblait fonctionner, les véhicules ennemis ne parvenaient pas à avoir une fenêtre de tir suffisante sans se mettre à portée du canon d’Aymen. Les munitions du canon Tarask faisaient voler des morceaux de bois et arrachait des feuilles au passage. S’il n’avait pas plu la veille, un incendie aurait très probablement pu apparaître sous l’échange intense des feux croisés. Aymen entendit soudainement un tir plus près que les autres. Il ne venait pas du front, celui-ci semblait venir de l’arrière. Un seul canon, assez léger, peut-être un fusil d’assaut. Quelques rafales en semi-automatiques se firent entendre, une ou deux balles ricochèrent même sur la carosserie du VBCI duquel tirait Aymen. “ - Sylvain, dit Aymen, prend la Tarask, quelqu’un nous contourne je vais voir. -Tu veux pas laisser les autres aller voir ? -Les tirs sont concentrés sur leurs véhicules, ils peuvent pas bouger. Moi je vais sortir et le contourner. -Ok vas-y” Aymen descendit de la tourelle et se prépara à sortir en courant. Il ouvrit brièvement la porte arrière du VBCI et courut sous des rocher situés près des roues du véhicule pour se mettre à l'abri. Le tireur l’ayant visiblement repéré avait intensifié les tirs et changé de direction. Aucune balle ne toucha Aymen, elles le manquèrent toutes de quelques mètres, signe que le tireur était probablement à plus de deux cent mètres. Aymen le prit en chasse. Il riposta en direction des tirs, soutenu par une des tourelles 7,62 d’un VBCI ami qui l’appuyait. Mais les tirs provenaient du bas de la pente abrupte en face de laquelle ils étaient stationnés. Le véhicule, qui ne pouvait risquer de se déplacer, ne pouvait pas atteindre le tireur. Il devait y aller seul. Aymen progressa accroupi dans le feuillages, se déplaçant sur le côté pour tenter d'attirer les tirs sur un autre angle. Le tireur ne se montrait pas. Aymen tirait, le tireur ripostait. Il était visiblement seul, aucune arme supplémentaire ne se faisant entendre de cette direction. Les échanges de tir durèrent quelques minutes, s’intensifiant jusqu’à ne plus laisser à Aymen qu’un seul chargeur plein à son imitation chinoise de Famas. Hors de question de laisser un tireur à l’arrière et retourner dans le véhicule. Il décida de tenter le tout pour le tout. Il lança sa dernière grenade fumigène et tira quelques balles avant de courir en diagonale en direction de son adversaire. Il courrait sans savoir exactement où il allait, se laissant guider uniquement par le bruit des tirs de plus en plus proches, qui cessèrent bientôt. Son dernier chargeur était vide. Reprenant son souffle quelques secondes, il entendit derrière lui le bruit du frottement d’un vêtement sur le sol. Il était arrivé derrière son adversaire. Se retournant au ralenti pour éviter le moindre bruit suspect, il se retrouva bientôt face au dos d’un tireur allongé dans les feuillages. L’arme qu’il manipulait était une mitrailleuse lourde qui reposait sur deux pieds. Aymen bondit de sa cachette, couteau tactique à la main, se ruant sur l’ennemi qui se retourna brusquement, sans avoir le temps de réorienter son canon trop lourd pour un corp à corp.. Le tireur sortit son arme de poing, mais Aymen se jeta sur lui au moment où le coup de feu partit. La seconde d’après, la lame d’Aymen avait sectionné la carotide du tireur, qui se vida de son sang, et mourut quelques minutes plus tard. Aymen s’écroula, blessé au bras. 7 décembre 2024 Aymen était comme à son habitude stoïque face à sa tante. Elle le regardait fixement, sans dire un mot depuis déjà plusieurs secondes. Elle s’occupait en même temps de nourrir le nouveau-né qu’elle tenait dans les bras, le neveu d’Aymen, qui avait maintenant huit mois. “ - Et donc, tu pense que tu n’as rien à te reprocher dans cette histoire ? Demanda Naïma. -Elle n’a jamais manqué de rien, j’ai toujours été là pour elle. Je ne lui ait jamais manqué de respect, je n’ai jamais levé ma main sur elle. -Ouai, et pourtant elle est partie. Tu crois pas qu’il y a un problème ? -Moi je n’ai pas de problème. -Si tu en as un ! Tu reste renfermé sur toi même tu est impassible même Meryem te l’a dit tu te rappelles, ça fait six ans déjà ! On voit aucune émotion sur ton visage, tout le temps le même air on peut pas savoir si tu est triste, joyeux, tu communique pas ! Tout t‘est égal ! -Je suis comme ça quand je juge que la personne en face n’est pas assez stable pour que je me dévoile. Et elle n'était pas stable. -Non, tu es comme ça parce que t’as décidé de l’être ! Pour éviter de souffrir tu préfère ne rien ressentir ! -Non je n’ai pas décidé. Je ne ressens pas le besoin de m’exprimer tout le temps, d’étaler mes émotions à ma femme et dire ce que j’ai dans le coeur à chaque seconde, on est pas tous pareils chacun a son caractère. -Et donc toi tu souffre pas de cette situation ? Dans ta vie de tous les jours ? -C’est pas la question… Oui je suis triste des fois, mais tout le monde souffre dans sa vie ça arrive et franchement j’ai pas à me plaindre. -Pourquoi ? Pourquoi tu te plains pas ? -Parce que j’ai pas à me plaindre. -On a tous forcément des choses qui nous chagrinent. Et c’est humain de le partager, si tu ne le fais pas tu perturbe ceux qui vivent avec toi. Tu sais c’est ça ton problème. -C’est quoi mon problème ? -Tu fais souffrir les gens parce que n’as aucune miséricorde envers toi-même.” Aymen s’effondra instantanément en sanglots, se choquant lui-même et sa tante au passage. Naïma ne dit plus rien. Sa réaction avait été totalement imprévue. Aymen vida en quelques secondes dans quelques larmes l’accumulation de plusieurs années de souffrance, de violence et de frustrations, avant de reprendre ses esprits. “ - Tu vois, dit doucement, Naïma, ça fait du bien de tout sortir des fois…” En réalité, sa tante, psychologue de formation et pourtant très proche de lui depuis son enfance, n’avait pas réellement compris ce qu’elle venait de faire. Elle pensait l’avoir aidé à commencer à exprimer ses émotions, mais Aymen n’avait pas changé d’un poil. Tout ce qu’elle venait de faire, c’était vider un réservoir qui allait pouvoir se remplir plusieurs années avant de craquer à nouveau. Une détonation les sortit de leur discussion. Des pétards ou un véritable coup de feu ? Difficile à dire... “ - Oh mon Dieu ! S’exclama Naïma. -C’est la milice des fans à Bernardo, dit Aymen. Il faut partir. -Comment ils sont arrivés dans le quartier ? Je croyais que la police les avait chassé ! -La police ne peut plus chasser personne maintenant. Il faut partir vite. -On va où ? -On va récupérer ‘ammi Khaled et on va chez maman. -J’appelle Nabil il faut qu’il vienne aussi. J’appelle tout le monde. -Ok”. Les préparatifs furent très brefs, Quelques sacs, une valise. Le bébé pleurait, l’explosion et la précipitation l’ayant stressé et mis mal à l’aise, lui qui savourait paisiblement un yaourt maison. Aymen chargea la voiture de sa tante et en prit le volant. Il démarra en trombe et passa le portail de la résidence. “ - Ok Google, dit Aymen. Emmène moi au travail de Khaled Mimoun. -Compris, voici le trajet pour vous y rendre. répondit le smartphone en enclenchant la navigation GPS.” Il faisait nuit noire. Aymen chercha à contourner de manière la plus large possible l’endroit d’où semblait provenir l’explosion et d’où s’élevaient à présent des cris et de la fumée. Malgré ses efforts, il passa quand même par une rue où se déplaçaient une bande d’hommes torse nus. Aymen accéléra pour traverser la rue le plus rapidement possible. Un mouvement d’hommes éparpillés semblait se diriger vers le commissariat. Des torches avait été confectionnées à partir de tissus et de bâtons récupérés sur les chantiers. Des hommes torses nus utilisant leur t-shirt comme masque. Lorsqu’un des hommes s’aperçut que sur le siège passager de la Citroën C4 était assise une femme voilée, les jets de pierres ne tardèrent pas à fuser. Aymen se mit vite hors de portée des jets qui n’avaient heureusement endommagé que la carrosserie et cabossé une porte. Aucune vitre n’était brisée. Il quitta la ville pour rejoindre l’autoroute, et alluma la radio. Ce qu’il entendit le laissa de marbre, mais fit pousser des cris d’effrois à sa tante. L’Article 36 venait d’être activé par le gouvernement. A cause des émeutes des quartiers, des milices d’extrême gauche, d’extrême droite, des zadistes devenus incontrôlables, du prix des denrées alimentaires qui explosait à vue d’oeil, une nouvelle phase avait été décrétée. Le pays était officiellement en état de siège. 3 Juillet 2039 L’assaut de la semaine dernière avait été un succès. Maxime et ses hommes avaient pris position sur ce qui était jusque là un campement ennemi. Ils avaient perdu trois hommes lors de l’assaut, et l’ennemi, qui avait au final peu résisté et s’était rapidement retiré, en avait perdu une trentaine. Ils enterrèrent les corps de leurs frères considérés comme martyrs sans les laver, et Maxime s’assura également que soient creusées des tombes décentes aux défunts ennemis. Le soleil n’était pas encore levé sur le camp, Aymen était en train de laver ses avant bras tandis que Sylvain faisait retentir l’appel à la prière dans la forêt. Le camp s’activait petit à petit. Des ombres sortant des tentes pour se rendre à l’espace de prière improvisé. Le décor était spécial mais était devenu familier à Aymen. Essentiellement composé de terre, de troncs d’arbres aménagés, de tôle et de sacs de sables, ce nouveau camp ressemblait à une version forestière de celui qu’ils avaient maintenant laissé à une troupe de relève. Les plus jeunes s’étaient organisés pour acheminer l’eau jusqu’au centre du campement et avaient creusé une petite digue pour l’évacuation. Aymen rejoignit le premier groupe pour la prière de l’aube. Le front sur le sol, il soupira de soulagement, répétant les mêmes demandes, qui n’avaient pas changé en 20 ans. Son bras endolori ne l’avait pas empêché de se lever pour la prière. Heureusement, la balle qu’il avait reçue avait traversé son bras et était ressortie déchirant une partie de son muscle sans toucher d’os. Mais la blessure n’était pas guérie pour autant. Les moyens de chirurgie sommaires dont ils disposaient lui avaient permis d’avoir un bandage solide mais sans soins aussi complet qu’un hôpital aurait pu offrir. La journée fut consacrée au rétablissement des défenses de leur nouvelle position, l’organisation du camp et la transmission d’information à leurs supérieurs. Aymen participait autant qu’il le pouvait, avec un seul bras. Maxime avait pris note de sa blessure assez rapidement et Aymen redoutait qu’il lui demande de se retirer du front. C’était bien évidemment hors de question. Alors que le blessé transportait les sacs de nourriture pour les distribuer dans les différents coins cuisine, Maxime s’approcha de lui les bras croisés. “ - Salam alaykoum Aymen, comment tu vas ? -Al hamdoulillah, toujours debout et en forme ! -Ca va ta blessure, pas trop mal ? Quand tu nous a dit que tu étais insensible j’imagine que tu ne parlais pas de ça, dit son chef en souriant.” Aymen rendit son sourire à son chef qui était maintenant à un mètre de lui. Maxime était un homme bien bâti la barbe rousse soigneusement coiffée. Il devait avoir son âge, peut être quelques années de moins. Aymen avait une stature imposante et il aurait fallu sans doute cinq ou six balles du même calibre pour endommager sérieusement son bras. “ - Je parlais pas de ça c’est sûr ! En tout cas ne t’en fais pas, je peux continuer à aider ici même si je vais devoir attendre un peu avant de porter une arme. -Justement je voulais t’en parler, tu sais tu n’est pas obligé de rester ici. Vu ton expérience dans l’agriculture, tu serais très utile en ville. Nos plantations connaissent un grand succès et on compte agrandir la production, on vient d’acheter de nouveaux terrains à la mairie de Rodez ils nous font confiance pour ce projet. -Qu’est ce que je devrais faire ? -Gérer le projet et l’exploitation des champs. Le recrutement, le logement des paysans, les variétés à planter. -Maxime.. je veux pas y aller, ma place est ici avec l’ATD. -Aymen, tu est tireur. Si tu ne peux plus tirer autant aller là où tu sera plus utile non ? -Je veux rester combattre, je ne veux pas fuir. -C’est quoi combattre pour toi ? Est-ce que tu mépriserai tes frères qui travaillent dans les champs ? -Non bien sûr… -Tout le monde est important Aymen, ce n’est pas parce qu’on fait partie de l’ATD qu’on est spéciaux. On est pas des forces spéciales. Je ne veux pas te forcer, mais réfléchis-y, tu serais bien plus utile là bas. -Je sais pas, rester assis à donner des ordres vraiment c’est pas quelque chose qui m’enchante… -C’est quoi qui t’enchante ? -Le son de Tarask, et l’Adhan1 de Sylvain. 1 Adhan : Nom arabe désignant l’appel à la prière islamique -Tu te trompe si tu pense que tu vas rester assis ! Tu as un bras blessé mais tes deux jambes tu va les utiliser, crois moi ! -Il n’y a personne d’autre pour le faire ? C’était pas prévu que je me blesse ils devaient bien avoir une autre personne de prévue pour le poste. -Les informations circulent vite, on est déjà préparés pour pas envoyer les blessés au chômage , il y a du travail pour tout le monde, et si tu es d’accord, il y a du travail pour toi aussi. -Quelqu’un m’a demandé ou c’est toi qui m’a proposé ? -J’ai proposé plusieurs personnes quand j’ai dû remonter la liste des blessés à la Medina. La soeur qui supervise les plantations de la région a vu ton nom et elle t’a demandé. -Ah bon ? Elle me connaît ? -Je ne sais pas, elle est assez âgée mais tabarakAllah elle est en forme ! -Tu la connais toi ? -Pas vraiment, je connais juste son prénom, elle s’appelle Naïma. Aymen n’avait pas entendu ce nom depuis presque vingt ans. 9 décembre 2024 Tous les adultes de la famille étaient réunis dans le salon de la maison. Une vingtaine en tout. Aymen avait quitté la région parisienne avec sa tante et, bientôt ses oncles et tantes éparpillés partout en France se rejoignirent chez leurs parents, grands-parents maternels d’Aymen. La tension était palpable, l’incertitude croissante, et le choc pas encore digéré. Les enfants jouaient dans une pièce voisine, insouciants de ce qui se passait. Un des jeunes de la famille, visiblement peu concerné par le monde qui l’entourait, jouait sur sa console portable en surveillant d’un oeil les enfants. Dans le salon, l’heure était aux préparation en vue d’une fuite pure et simple. “ - Ce que je propose, reprit Nabil, c’est que toi Naïma, tu parte avec maman et papa en premier. Moi avec Abdallah, on attend que les étudiants aient fini leur année, on les récupère à Dijon et on vous rejoint. -C’est pas une bonne idée Nabil, répondit Naïma. Franchement ça sert à rien de les faire attendre là, il faut partir maintenant sinon… -Il reste deux semaines avant les examens on peut les laisser finir ? Interrompit Abdallah, le plus jeune de la fratrie. Enfin je sais pas demandez aux mamans… -Je préfère qu’ils finissent leur année d’étude Naïma, répondit Samira, l’aînée. -Pourquoi ? Pourquoi Samira ? Tu es consciente qu’ils seront peut-être bloqués dans la ville pour un moment, et plus longtemps que pour le covid, là on est entrés dans une autre dimension c’est des gens armés qui veulent tuer ! ” La soeur ainée de la fratrie ne réalisait pas l’ampleur du changement. Venue en France âgée d’à peine deux ans, elle était la seule née en Algérie, tous ses frères et soeurs étant nés en France après que leurs parents aient suivi la vague de migration économique d’après-guerre. Elle avait toujours connu une France relativement tranquille, avait toujours été polie, gentille, remerciait ses voisins et leur offrait des gâteaux à l’Aïd. Pour elle, être gentil avec les gens suffisait à garantir la paix dans le monde. Bien qu’elle en portait énormément en elle, elle n’avait jamais compris la violence quel que soit le camp d’où elle venait et quelle que soit sa forme. Que des personnes armées courant les rues, hors de contrôle, à la recherche de chair à remigrer ou à exécuter lui glaçait le sang. Son fils aîné, Aymen, assistait à la discussion sans dire un mot. Peu importe la décision de sa famille, il suivrait et protégerait comme il pouvait ses oncles, tantes, frères et soeurs. Mais étrangement, aucun sentiment d’amour n’habitait son coeur, la motivation qu’il ressentait relevait davantage du devoir. Si son ex-femme lui avait demandé à cet instant “Pourquoi tu le fais ?”, il aurait sans doute répondu “Parce qu’il le faut”. Alors que chacun était tendu, sa propre mère tremblait, Aymen n’était pas sorti de son état de marbre et restait imperturbable. Comme si ce qu’ils vivaient n’était pas réel. Comme si ça n’était qu’une suite d’évènements auxquels il fallait apporter une réponse logique et appropriée. Comme si c’était une simulation. Elle était loin l’époque où, enfant, il avait paniqué lors de l’explosion d’un missile à quelques kilomètres de la maison de ses grands parents paternels au Liban. C’est comme si, depuis cette époque, il s’était en permanence préparé à cette situation. Elle était inéluctable, se répétait-il depuis des années. Ses grands parents maternels, eux, vivaient en France, et pensaient avoir mis les pieds dans un pays qui ne connaîtrait jamais, ou pas dans un avenir proche pour leurs enfants, l’instabilité et l’insécurité. Une fois la discussion terminée, la décision avait été prise. L’homme le plus âgé de la fratrie, Nabil et Khaled, accompagnés de Aymen et Salim, son jeune cousin, iraient chercher les étudiants qui dormaient paisiblement dans leur chambre du CROUS à Dijon, pendant qu’un premier groupe se rendait à la ferme déposer les enfants en bas âge et leurs grands parents. Cette ferme était un projet familial de longue date qui avait failli ne jamais voir le jour. Après avoir passé des années à chercher un terrain puis à changer d’avis concernant la pertinence de l’achat ou non d’un terrain, ils avaient finalement trouvé une ferme à prix très intéressant. Mais même une fois l’achat fait, chacun se complaisait dans son quotidien de citadin de 21e siècle et aucun n’avait vraiment envie d’abandonner ses projets en cours pour vivre comme un paysan du début du 20eme siècle. Les récents événements avaient changé la donne. La priorité était actuellement de fuir les grandes villes, devenant dangereuse, pour se réfugier loin des troubles et rester en groupe. Le frère d’Aymen, sa soeur ainsi que deux de ses cousins étudiaient à Dijon. Les émeutes n’avaient pas encore pris beaucoup d’ampleur là bas mais l’insécurité devenait quand même préoccupante. Des bandes s’étaient formées et parcouraient les rues en quête d’affrontement avec les camps opposés, dans le but d’en découdre. Avec la déclaration de l’état de siège, conséquence de l’utilisation de l’article 36 au vu des évènements devenant incontrôlables, il fallait réunir tout le monde et déguerpir le plus rapidement possible. “ - On y va quand ? Demanda Aymen à son oncle. -Maintenant, répondit Nabil en sortant les clés de la voiture de sa poche. -Ok je monte avec toi.” Ils décollèrent à deux par voiture, Aymen monta dans celle de Nabil, son cousin Salim dan la voiture d’Abdallah. Nabil ne disait presque rien sur la route. Heureusement, le trafic n’était pas encore trop dense, et Dijon n’était qu’à une centaine de kilomètres. Le smartphone d’Aymen vibra dans sa poche. Un message d’Amina, son ex femme. “ On part se réfugier au maroc avec ma famille. J’espère que vous allez bien toi et la tienne. Salam à Naïma.” Aymen ne répondit pas, se contenta de faire glisser le message pour le faire disparaître. Il appela son frère Saïd, qui décrocha aussitôt. “ - Allo Aymen ? -Ouai Saïd on arrive dans dix minutes là vous êtes prêts ? -Presque je dois juste aller aider Noria pour rassembler les draps. -Laisse tomber les draps là on a pas le temps. -Ok, on vous attend en bas ? -Non sortez pas de chez vous, quand on arrive on vous sonne, on montra vous chercher. -Ok”. Nabil se gara quelques minutes plus tard sur le parking du campus qui abritait plusieurs résidences étudiantes. l’endroit était agité. Visiblement, plusieurs étudiants rentraient aussi chez leurs parents, venus les chercher en voiture. Il y avait même une moto, sur laquelle essayaient de monter un père et son fils qui avait embarqué tout ce qu’il pouvait dans un sac à dos plein à craquer. Une fois qu’ils avaient récupéré Saïd et placé ses affaires dans la voiture, ils se dirigèrent vers la résidence de leur jeune soeur, Noria. Nabil les accompagnait. Alors qu’ils se dirigeaient tous les trois vers l’entrée B du bâtiment, le téléphone de Aymen sonna. C’était sa soeur. “ - Aymen ? -Oui ? Vous êtes où là ? -En bas on arrive. -Attendez montez pas tout de suite, y’a les abrutis du deuxième qui font les guignols dans les couloirs. -Comment ça ? Dit Aymen en faisant signe à son frère et son oncle de ne pas monter ? -Un espèce de groupe d’extrême droite ou je sais pas quoi, ils crient dans les couloirs et frappent les portes. -Bouge pas on arrive. -Non attention, il vaut mieux attendre qu’ils partent.” Aymen raccrocha. Il informa son oncle et son frère et tous les deux passèrent l’entrée du bâtiment qui était presque toujours ouverte en raison des sorties régulières. Quelqu’un finit par placer un carton plein de livres pour bloquer la porte dans le but de faciliter le déménagement de son fils, qui paniqué ne voulait plus rester seul dans cette résidence étudiante. Une fois en bas de la cage d’escalier, les trois hommes constatèrent des cris qui s’élevaient effectivement des étages supérieurs. “Une seule solution, c’est la remigration !” criait un jeune visiblement surexcité en cognant les portes. Un autre s’élançait dans le couloir en hurlant “Aux aaarmes citoyeeens... qu’un sang impur...” La bande déambulait dans les couloirs comme un cortège de manifestants, pour faire passer un message confus et sans queue ni tête d’après Aymen, mais dangereux quand même. Ils prirent l’escalier, pour éviter une éventuelle panne dû à une vandalisation de l'ascenseur, et arrivèrent au troisième étage. Le couloir semblait désert, la bande étant encore au deuxième. Ils frappèrent à la porte de Noria, qui sortir avec son sac à dos dans la précipitation. “ - Allez on y va, dit Nabil. Tu as rien oublié ? -Ben j’ai pas pris grand chose, vous m’avez dit de faire vite. -Oui prend juste le nécessaire là on doit y aller avant que les routes soient encombrés.” Le groupe quitta la chambre étudiante et prit la direction de l’escalier en vitesse. En traversant le couloir, ils tombèrent nez à nez avec trois hurluberlus torse nus, tatoués à souhait, qui les interpellèrent immédiatement en voyant le voile de Noria. “ - Bouuuuh !! Re - mi -gra - tion !! S’écria l’un d’eux. -On veut juste passer laissez nous tranquils avec vos bêtises d’accord, dit Nabil. -Ouai c’est ça passe bougnoule et rentre chez toi dans ta musulmanie ! -Eh tu te calme mon gars je te préviens. j’en ai rien à faire que tu sois avec tes potes, vous êtes ridicules avec vos délires là t’as fait quoi dans ta vie à part regarder des séries tu te prend pour un résistant ?” Mauvais plan. Aymen connaissait Nabil, très nerveux et souvent prêt à en découdre à la moindre altercation. Il ne supportait pas les manques de respect de ce genre, et même dans un contexte d’urgence, faire profil bas lui demandait un effort surhumain. Le plus costaud des trois jeunes hommes s’approcha de nabil en bombant le torse. “ - Il a un problème le bougnoule ? Il veut une carte pour rentrer en musulmanie ? -Dégage de là avant que je t’en mette une. -Vas-y essaye pour voir. -Bouge de là je te dis. -T’es pas chez toi ici mon gars.” Le dialogue, si tant est qu’il ait commencé un jour, ne continua pas plus loin, Nabil plaqua immédiatement le premier au sol, Aymen et Salim s’engagèrent par réflexe sur les deux autres. Noria cria de frayeur et s’éloigna de la mêlée. Aymen et Salim avait attaqué le premier qui avait adressé la parole à Nabil. Nabil avait rapidement plaqué son adversaire par terre et lui serrait maintenant la gorge en abattant à grande vitesse ses poings sur son visage. Ce dernier lui agrippait le cou d’une main et essayait de se dégager. Aymen, peu apte au combat en raison d’un physique maigrelet et d’une absence totale d’entraînement au combat, malgré sa nervosité, se contentait d’appuyer son frère Salim, plus costaud que lui, en mettant des coups de pieds. Un poing dans la machoir le sonna, mais réveilla littéralement sa rage. Aymen rua de coups le deuxième compère autant qu’il le put. Ce dernier semblait lui aussi dans un état second, sans doute mentalement en croisade contre les sarrazins au douzième siècle. Aucun dialogue n’était plus possible, l'équilibre ne serait atteint que lorsque chacun aurait transmis la violence qu’il avait hérité. La bande fut malgré quelques légères blessures assez rapidement maîtrisée en grande partie grâce à Nabil, qui avait sorti un tazer de sa poche et maîtrisé le plus costaud qui refusait de lâcher prise. Les trois homme accompagnés de la jeune femme s’enfuirent en courant du bâtiment et regagnèrent la voiture, de laquelle ils décollèrent en vitesse. Abdallah de son côté avait récupéré le reste des étudiants, le groupe quitta la ville en direction de la ferme. 3 Juillet 2039 Aymen était content de voir sa tante. Plus que content, il en était heureux. Un léger sourire déformait son air neutre lorsqu’il la serra dans ses bras. Il sentit même une petite larme couler sur sa joue. Maxime avait dit vrai, malgré ses soixante-cinq ans, elle était enthousiaste, et à son habitude, très expressive. La maisonnette dans laquelle ils étaient bordait un immense champ qui ressemblait par endroits à une petite jungle. C’était là que vivait sa tante, visiblement en sécurité, dans la ville qui était devenu la capitale de l’entité : Fajr. Le soleil était haut et frappait fort, alors qu’il était à peine huit heures du matin. Un léger vent frais venait compenser la chaleur lourde qui s’était abattue sur la région. Le mobilier de la maison était très simple, voir inexistant. Essentiellement issu de matériaux de récupération du début des années 2030, en plastiques et en tôle. “ - Comment tu as atterri ici toi ? Lui demanda Naïma en séchant ses larmes. -Longue histoire… lui répondit Aymen en défaisant son étreinte, et toi alors ? Depuis qu’on s’est séparés j’ai plus eu aucune nouvelle… Où sont les autres ? Vous allez bien ? -On va bien al hamdoulillah… mais on est pas tous là malheureusement. Je t’expliquerai. -D’accord… on m’as affecté ici pour travailler. Apparement -Aymen, calme, doucement, ici on est pas au front. Attend un peu on aura tout le temps d’en parler, ça fait presque vingt ans qu’on s’est pas vus quand même.. -Oui…” Aymen avait commencé directement par aborder le côté pratique, réfléchissait à ce qu’il fallait faire, évaluait la charge de travail, les possibilités, alors que sa tante était pour le moment simplement contente de le retrouver. Elle le regarda, et sourit. Une seconde plus tard, Aymen fondit en larmes, comme il ne l’avait pas fait depuis presque vingt ans.
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