The Beginning of Anything Maxime Fauconnier Film d’images trouvées, couleur, stereo, 25min, 30fps, 2022 *** “The Beginning of Anything” veut montrer ce qui ne se voit pas. Le film développe joyeusement le préfixe “any” et son refus du contenu : anywhere , anytime , anyhow . N’im - porte et finalement peu importe. Peu importe de produire des images ou faire du figuratif, “The Beginning of Anything” est un film d’image trouvées qui filme le brouillard. Dans ce flou émerge une réflexion continuelle sur le geste. Il y a la matière, trouvée sur YouTube comme s’il suffisait de se pencher au sol. L’enjeu n’est pas dans la production mais bien dans ce qu’on en fait. Du mot-clef “brouillard” tapé dans la barre de recherche, le travail s’est petit à petit déplacé vers des regroupements de plans en étapes de récit, où le concepteur—et son monteur Romain Waterlot—furent les premiers à jouer le jeu prospectif, à projeter des formes et pivots narratifs sur la matière existante. “The Beginning of Any - thing” une question de dosage, où il a fallu sentir comment construire sans imposer, com - ment pallier à l’interventionnisme sans perdre le spectateur. Définir sans assigner. Proposer. Et dans cette fine nuance, nous nous immergeons dans une langue inconnue et nous habituons à sa structure. Nous commençons à notre tour à jouer. Dans ce songe, nous identi - fions des logiques, nous en manquons certaines, et nous en projetons d’autres. La distinction entre la structure et ce qu’on y voit devient impossible. L’expérience cinématographique et notre confiance en elle se structurent et nous permettent finalement d’avancer à l’aveugle, main dans la main. Nous y sommes accueillis, nous y sommes libres et actifs. Capables de préciser la singularité de notre regard sur la matière, d’identifier ce qui nous semblait acquis et qui pourtant ne l’est pas. Nous nous étonnons du regard des autres, des descriptions des voix off, de leurs émotions. Nous expérimentons collectivement la subjectivité Dans la grisaille des plans, le son s’impose. Les voix off des filmeurs dressent les scènes. Le montage image et le travail sur le son deviennent l’endroit où la conception peut finalement s’épanouir, donner du corps au hors-champs et aux images indiscernables, de ce que cela appelle en nous. “The Beginning of Anything” est une expérience de tabula rasa qui nous déplace vers le processus tout en relevant le défi d’interroger les liens qui unissent fond et forme. Ici, les rôles s’estompent et se floutent. Le trouble habite le format de l’oeuvre, rap - prochant toujours plus spectateurs, concepteurs et matière, dans un tracé dont le devenir synergique propose une définition subversive de l’objet cinématographique et de ses fron - tières. Carla Frick-Cloupet