06 42 90 04 01 louise.cvlls@gmail.com @louise_covillas Louise Covillas La pratique artistique de Louise Covillas est une pratique d’attention ; à notre quotidien, à l’habituel, et à tout ce qui est en capacité de les perturber. Elle souhaite rediriger notre regard sur les subtilités dissimulées dans notre tableau quotidien apparemment banal, et révéler ce qui réside dans les interstices. Dans les différents environnements au sein desquels elle évolue, Louise cherche les perturbations ; ces éléments qui (d)étonnent et qui apparaissent comme autant de bouffées poétiques dans un paysage parfois monotone. Au-delà d’entreprendre une démarche de réenchantement du quotidien, il est aussi question d’identifier des brèches à l’intérieur d’un système bien huilé et trop ordonné. Ces points de résistance constituent la substance même du travail de Louise qui nourrit des réflexions sur la façon dont on regarde et dont on habite le monde. Tant à travers une recherche formelle que conceptuelle, Louise tente de déplacer un point de vue anthropocentré et normalisé sur le monde, pour se focaliser sur d’autres perspectives et proposer des clés pour en faire une expérience alternative. Depuis 2019, Louise capture avec son iPhone des situations auxquelles elle assiste où ces fissures sourdent dans le réel. Trois coquilles d’œuf gisant dans le caniveau du métro, une balle de tennis coincée entre les barreaux d’une barrière, un bateau en papier trônant sur une tasse à café aperçue en terrasse ; ces mises en scène sont autant d’arrêts sur image d’instants de vie achevés que Louise aime à imaginer. Ces incidents hasardeux dont elle est témoin sont assemblés au sein d’une vidéo qu’elle alimente encore aujourd’hui, comme un catalogue faisant état de l’infinité de manières de troubler poétiquement le monde. Au-delà de chercher ces hasards dans son environnement, Louise se plait également à en créer. Elle conçoit des sculptures et des installations qui prennent la forme d’associations incongrues : un radiateur accueillant de la vaisselle entre ses fentes pour devenir range- ou chauffe-assiette, des oranges emmaillottées dans leur emballage qui, disposées au sol, s’apparentent à des tortues entamant un balais absurde. Tels des rébus apparemment irrésolubles, ces objets assemblés sont détournés de leur fonction initiale et dotés d’autres usages. Ces travaux sont révélateurs de l’intérêt que porte Louise dans ses recherches à la charge sémiologique des objets qui peuplent notre quotidien. Se pose-t-on jamais la question de ce qu’ils disent de nous et de notre société ? L’on connaît pourtant la capacité des artefacts culturels à construire un certain sens à travers les signes qu’ils représentent. Louise entreprend ainsi de les détourner de leur connotation première afin de créer de nouveaux systèmes de signes et de nouvelles associations sémiologiques. Dans sa pratique, Louise développe ainsi une œuvre entre empirisme et poésie qui nous invite à nous écarter de nos schémas hérités et à envisager autrement notre relation au domestique, au territoire et au vivant. Capucine Buri Née en 1996. Vit et travaille à Paris. SÉLECTION D’EXPOSITIONS ‘Prix Dior de la Colle Noire 2023’; Chapelle des Beaux-arts de Paris, Paris, France. 2022 ‘Ne pas déranger’; Emploi Fictif, La Tour Orion, Montreuil, France. ‘Super Soft’; La Fonte, sortie de résidence, Genève, Suisse. ‘Exposition Flottante’; Vincent Hulme, Paris, France. ‘L’Appel’; Eugénie Touzé, Palais des Beaux-arts, Paris, France. 2021 ‘For sculpture to happen’ DNAP ; Beaux-Arts de Paris, Paris, France. 2020 ‘À mort le rose fluo’; Juan D’Oultrmont, Bruxelles, Belgique. ‘Hyperaction’; Galerie Folle Béton, Paris, France. ‘Tirage à la corde’; Wave Cube, Paris, France. ‘Gracias por venir’; Jonàs Fadrique, Paris, France. 2023 2019 ‘Video Snack VI’; Virginia Commonwealth University, Richmond, États-Unis. ‘Today’s clouds plagiarize yesterday’s clouds’; Yue Yuan, Shanghai, Chine. ‘La maison de rendez-vous’; Galerie Folle Béton, Paris, France. WORKSHOPS 2020 ‘Geste filmé, gestes filmiques’; Julien Prévieux, ENSBA - Paris, France. ‘Prise de son, Installation-Diffusion’; Vincent Rioux, ENSBA - Paris, France. 2019 ‘Artiste Collectionneur’; Paul Devautour, Offshore - Shanghai, Chine. ‘Outils numériques’; Marc Wathieu, ERG - Bruxelles, Belgique. ‘Discours’; Juan D’Oultremont, ERG - Bruxelles, Belgique. 2018 ‘Queer with Class, HOMOCUL’; Caroline Dath, ERG - Bruxelles, Belgique. ‘Studio Paroles Recordings’; Saâdane Afif, Wiels - Bruxelles, Belgique. PUBLICATIONS Archive personnelle d’une collection de prospectus de 2012 à 2022, auto-édition. 2023 COMMISSARIAT D’EXPOSITION ‘LASCAUX6’ ; co-curation, La Tour Orion, Montreuil, France. 2023 Nominée au Prix Dior de la Colle Noire 2023. 2023 RÉSIDENCES & PRIX ‘Collectif La Fonte’; Genève, Suisse. 2022 ‘Offshore’; Paul Devautour, Shanghai, Chine. 2019 DNSAP - École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris. Atelier : Isabelle Cornaro. 2021 - 2022 Échange Erasmus, Korea National University of Arts - Séoul, Corée du Sud. Atelier : Soyoung Chung. 2018 - 2021 DNAP - École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris. Ateliers : Julien Prévieux, Claude Closky, Anne Rochette. 2016 - 2018 École de Recherche Graphique de Bruxelles. Ateliers : Juan d’OUltremont, Marc Wathieu. 2015 - 2016 Centro de Arte e Comunicação Visual - Lisbonne, Portugal. 2023 - 2024 FORMATION Catalogue d’exposition ‘Ne pas déranger’ , Studio Jim Fontana - Emploi Fictif. 2023 2024 ‘La jeunesse a toujours raison même quand elle a tort’ ; Galerie Strouk, Paris, France ‘Avis de Tempête’ ; Césure, Paris, France. ‘CRUSH’; Beaux-arts de Paris, Paris, France. 2025 à venir ‘Des liens qui courent’ ; Chloé Bonnie More, Riberolle, France à venir ‘emploi fictif’ ; Thunder Cage, Aubervilliers, France ‘Avis de Tempête’ ; Festival Raccords, Le Sample, Bagnolet, France ‘Vente aux enchères’ ; Reflet Machine & 22 l’Galleu, Ivry-sur-Seine, France ‘MAISON(S)’ ; Les Apartés, Le Sample, Bagnolet, France Sans titre, 2022-2025. Bois, aquarelle, marrons, mirroir Par module 50 x 132 cm Cette pièce présente une branche dont l’écorce a été retirée, révélant une matière lisse, nue, fragile. Là où elle était abîmée, l’intervention à l’aquarelle vient réparer, panser, comme un geste de soin attentif. Chaque blessure devient alors lieu de reprise, de couleur, de regard. Posée sur un miroir sur mesure, la branche est offerte à une lecture complète : visible sous toutes ses coutures, ses détails, ses plis et ses nœuds. Le reflet démultiplie les angles d’observation, invitant à une attention soutenue, presque méditative. Elle tient en équilibre, calée simplement par des marrons trouvés, comme des cales improvisées — discrètes mais essentielles. Entre soin et sculpture, fragilité et reflet, cette pièce propose une forme de contemplation active. Une invitation à regarder autrement ce qui est cassé, à en souligner la beauté par la douceur du geste. Sans titre, 2025. Cire, parafine, étoiles fluorescentes, branches Taille variable Cette pièce en cire réunit un tirage d’os de seiche et une constellation d’étoiles fluorescentes, incrustées à même la surface. L’ensemble s’apparente à un tableau, presque une nature morte, dont les éléments débordent doucement du cadre : une branche épineuse ramassée vient prolonger la composition dans l’espace. L’œuvre joue avec les registres sensoriels et symboliques — la douceur de la cire, la lumière qui affleure dans l’obscurité, la rêverie d’une enfance imaginaire. Les matériaux, simples et chargés — étoiles, os, épines — convoquent un monde à la fois organique et onirique. Ce travail associe des éléments naturels et des formes mentales, comme une tentative de composer un nouveau récit. Un fragment suspendu entre l’observation du vivant et l’échappée vers le merveilleux. L’empreinte devient trace, et la trace devient fable. Collections, 2025. Cartes à jouer, éléments ramassés 8 x 12 cm Cette série est composée de 52 cartes à jouer ramassées dans la rue au fil des années. Témoins de passages anonymes, objets perdus et abîmés, chaque carte, unique, devient un fragment associé à des éléments prélevés lors de cueillettes : ailes d’insectes, ossements d’oiseaux, coquillages ou encore os de seiche. Ces ajouts, organiques ou symboliques, réactivent la carte comme support d’une narration silencieuse. Chaque pièce est glissée dans une pochette plastique transparente — à la manière d’un prélèvement ou d’un spécimen. Ce geste de conservation, presque scientifique, entre en tension avec la nature ludique de l’objet d’origine. Il évoque à la fois l’archivage d’un fragment et la mise en suspens d’un instant ou d’un possible. La série complète reprend la structure d’un jeu traditionnel de 52 cartes, mais ici, il ne s’agit pas de rejouer — il s’agit d’observer. Chaque carte devient une micro-narration, une pièce modeste mais singulière. L’ajout de matières naturelles crée un dialogue entre le jeté (la carte trouvée) et le cueilli (l’élément ramassé), entre l’urbain et le vivant. L’ensemble forme un archipel d’histoires autonomes, où l’accumulation fait œuvre. Il questionne notre rapport aux objets trouvés, à ce que l’on choisit de garder, de transformer, de réactiver. Ces cartes deviennent les supports d’une attention portée au hasard, à la cueillette, aux matières discrètes qui nous entourent — et à la manière dont elles peuvent, par le geste, devenir forme et récit. Sans titre, 2024. Résine, acier. Par module 45 x 30 cm, hauteur variable. J’ai réalisé cette œuvre en observant les souches de kombucha que je faisais pousser chez moi. Ce champignon symbiotique, formé de bactéries et de levures, a cette particularité de toujours prendre la forme de son contenant. Il ne lutte pas contre l’espace qui l’accueille, il s’y adapte, il s’y moule. Cette plasticité naturelle m’a donné envie d’en garder une trace. J’ai donc moulé plusieurs de ces souches en résine, créant une série de modules qui peuvent s’entrelacer, s’empiler, s’aligner, s’entrecroiser. Comme le kombucha, ils s’adaptent à l’espace où ils sont installés. Il y a dans cette œuvre une idée de prolifération, de cohabitation entre les formes. Rien n’est figé : selon l’agencement, de nouvelles interactions émergent, révélant à chaque fois un équilibre différent entre expansion et structure. En figeant dans la résine cette mémoire du vivant, j’interroge la manière dont les formes coexistent, comment elles s’ajustent les unes aux autres, comment elles trouvent leur place dans un espace donné. C’est une manière d’explorer ce dialogue silencieux entre adaptation et croissance, entre souplesse et contrainte. Till we bloom, 2024. DNSAP. Louise Covillas cultive la cueillette d’objets comme d’usages : elle a certes ramassé des coquilles d’escargot, une chrysalide de cigale, des ossements de goélands, mais a aussi beaucoup guetté. Elle a patiemment regardé les hôtels à insectes et niches à chat du parc de Belleville, le va-et-vient des souris dans l’atelier des Beaux-arts, la façon dont certains oiseaux investissent ou pas les nichoirs que les humains bâtissent pour eux. La façon dont les êtres vivants cohabitent la fascine, avec toute l’humilité que cette étude suppose : elle préfère mettre en avant dans son travail de possibles qualités d’attention et d’association plutôt que célébrer la figure démiurgique de l’artiste. La majorité des œuvres présentées lors de son diplôme sont de ce fait des collaborations : avec des vivants et des vivantes, êtres humains ou non, parmi lesquels des artistes avec lesquels elle a co-créé, Milana Gabriel, Anna Massiot, Pierre Moulin, Juliette Peres et Mathis Perron. Préférant le duo au collectif, elle a à chaque fois inventé avec elles et eux de nouvelles manières de penser, de s’adapter à l’autre, de produire des objets. Ne privilégiant aucun médium, ils et elles ont proposé plus qu’imposé, et émis par le biais de formes plastiques – abri à oiseaux, modélisations de terriers, dispositif sonore autour de l’escargot... – des hypothèses. Du conte naît parfois la résistance à des modèles dominants, des façons de réécrire le monde environnant face à des récits hégémoniques : lors de son diplôme, Louise Covillas portait sur elle une poche amovible conçue avec Milana Gabriel, référence à la fiction- panier d’Ursula K. Le Guin, petit espace physique ouvrant aux imaginaires les plus fertiles. Camille Paulhan Collaboration avec Mathis Perron, 2024. Assemblage en bois. 260 x 110 cm. Avec Mathis nous interrogeons ce que Baptiste Morizot nomme l’invite, soit « la manière dont on traduit un objet par ce qu’on a appris. C’est-à-dire,, (...) quand on voit une poignée de porte, on pense qu’on peut agir sur cette poignée et ouvrir la porte. C’est l’invite de la poignée de porte. » Quelle ouverture fait appel à quelle espèce ? Nous réalisons un répertoire d’invitations, proche de la partition de musique. Il s’agit d’une œuvre recto-verso, un côté à l’aspect presque minimal et un arrière plus désordonné, soit le fruit d’une collaboration, de deux façons de faire. L’œuvre est un assemblage de planches de bois récolté inscrivant la pièce dans une dynamique du « faire avec », soit ce que Donna Haraway nomme «sympoïèse». Sans titre, 2024. Chrysalide de cigale, cuivre. 24 x 80 cm Philippe Rahm considère le vêtement comme étant la première des architectures, le premier obstacle face au dehors. Cette chrysalide qui a été le premier abri d’une cigale, conduit à une nouvelle réflexion sur le dehors-dedans. Elle renvoie également au geste de la cueillette que je pense moins comme une déambulation aléatoire que comme la collecte méticuleuse de ce qui a été le fruit d’une observation précise. Collaboration avec Pierre Moulin, 2024. PLA, cire d’abeille, acier. 125 x 80 cm À l’école des Beaux-arts de Paris et en collaboration avec l’artiste Pierre, nous réalisons une sculpture qui illustre la cohabitation des étudiant·e·s de l’école avec les souris. Qui habite les interstices de l’atelier ? Comment, dans un territoire où la culture est dominante, la féralité opère-t-elle ? C’est cet ensauvagement discret que nous souhaitons explorer. Ce sont les traces que laissent derrière eux les petits rongeurs qui nous font prendre conscience de leur existence dans l’atelier, mais c’est également par l’habitude que nous avons de ne laisser aucune nourriture accessible que nous envisageons leur présence. Au-delà des traces, certaines existences ne peuvent être appréhendées que par les comportements qu’elles induisent chez d’autres vivant·e·s. Comme l’écrit Baptiste Morizot, c’est seulement l’attitude du chamois qui suggère la présence du loup, ce dernier restant invisible à nos façons de voir. Collaboration avec Anna Massiot, 2024. Grès, émail à froid, pigment, sable. 62 x 30 x 30 cm Avec Anna, artiste et ornithologue amatrice, nous observons un temps, des oiseaux nichant à l ‘école des Beaux-arts et aux alentours. Nous découvrons un couple de faucons pèlerins en pleine nidification dans un creux de la façade du Louvre. Ce phénomène est symptomatique d’un mouvement récent, le retour des oiseaux de falaise en milieux urbains. Ces oiseaux qui choisissent pour habitacle des creux de constructions humaines deviennent des oiseaux de façades . C’est pourquoi nous réalisons un fax-similé à la main d’un détail architectural, le corbeau, dont nous faisons un nichoir, prêt à accueillir un nid d’oiseaux de façade. Collaboration avec Juliette Peres , 2024. Moquette, plat à escargot, cire de fonderie, carte postale, bois, étain, dispositif sonore et plâtre. Prise de son et mixage par Ulysse «Ramses» Geneau. 430 x 200 cm En collaboration avec Juliette nous nous interrogeons sur l’habitacle qu’est la coquille pour l’escargot. « Comment habiter un espace en creux ? Avec la coquille pour maison-organe, comme promesse d’un dehors-dedans parfait. À travers la culture et l’histoire de l’art nous nous attaquons à ce que les hommes ont mis dans la coquille et se sont hâtés de représenter, sans regarder. Des représentations à démêler qui occultent les escargots. Avec un intérieur rond, comme résistance formelle, où toit et sol ne s’opposent pas, où ils forment un nœud. » Nous réalisons un espace de jeu et/ou de projection délimité par une moquette, à l’intérieur duquel un dispositif sonore permet d’écouter à la coquille de l’escargot comme on écoute la mer au coquillage. Les spectateur·ice·s peuvent découvrir le résultat de nos recherches tout en manipulant les objets que nous avons collectés et réalisés. Au début il y avait elle et elle, Louise et Juliette. Et puis elleux, c’est à dire celles et ceux que nous nommions d’une voix spontanée les coquillages. Avec la coquille pour maison-organe, comme promesse d’un dehors-dedans parfait. Mais c’est parce que ce que nous nommions chacune de la même façon au début, sans savoir pourquoi, que nous avons voulu renommer et montrer collectivement, ici. Ici, parce que Ici vient du latin ecce. Ecce pour dire voici, mais aussi pour dire “regarde”, ici, loin de la mer. Quand nous sommes rentrées un été de vacances, nous avions dans nos sacs des coquillages. Des coques, des moules, des bigorneaux que nous avions ramassés et nous étions donnés en o ff rande l’une l’autre. Souvenirs précieux, pourquoi n’avions nous pas fait de même quand nous étions rentrées de Bourgogne ? Les coquillages ont servi culturellement de nourriture, d’ornement, de monnaie d’échange, de souvenir d’un lointain qu’iels représentent, ici notamment, où iels sont absents et absentes. Notre relation avec les coquillages et les escargots est culturelle. Et le problème ce n’est pas tant les coquillages mais ce que les hommes ont mis dedans et se sont hâtés de représenter, sans regarder. Des coquillages qui n’en sont plus, des coquillages comme exotisme et conquête. Des représentations à démêler qui occultent les escargots. Et c’est pourquoi nous avions premièrement défini les escargots par ce qu’iels n’étaient pas. Nous les avions d’abord sagement saisis, comme on nous l’avait appris, par ce qui dépassait et ce qui était évident, la coquille, en pensant bien faire - avant de les comprendre en creux. Comprendre car saisir avec, avec un manque et ensemble, c’est à dire en reconnaissant ce que nous ne savions pas d’elleux. Aussi, il sera question du nous, le nous des elles et des elleux. Les elleux escargots qui ne sont pas des coquillages, pour une nouvelle invitation à la maison-organe. Avec un intérieur rond, comme résistance formelle, où toit et sol ne s’opposent pas, où ils forment un noeud. Un nouveau nous, donc, comme d’autres elles l’ont fait bien avant, au 13e et au 14e siècle. Des femmes qui ont invité dans les marginalia de leurs manuscrits domestiques des représentations d’hommes, toutes lances dehors face à des escargots. Des duels dérisoires qui saisissent à leur tour les héros par la pointe du toit de leur heaume. Des femmes qui se sont aussi emparées du genre de la nature morte comme opposition à la peinture historique pour y représenter d’autres coquilles. Cet accueil féminin fait aux escargots, comme rupture avec une narration conquérante du dedans- dehors, c’est celle que nous avons souhaité faire, Ici, Regarde. À écouter dans l’escargot, Collaboration avec Juliette Peres, 2024. Transcription de l’audio diffusé à l’intérieur du dispositif sonore. Sans titre, 2024. Résine, lumière, céramique. 80 x 80 x 50 cm. « Je dis habiter, je devrais dire cohabiter, car il n’y a aucune manière d’habiter qXui ne soit d’abord et avant tout “cohabiter”.» Extrait de Habiter en oiseaux - Vinciane Despret. Partant de ce constat, je me rends sur l’île du Frioul dont une partie est complètement occupée par les « gabians » (terme marseillais pour désigner les goélands) et reste inaccessible aux humain·e·s. L’île offre un exemple saisissant de la cohabitation que Vinciane Despret nous enjoint à déceler. Ce cube, à la fois socle et réceptacle de mon expérience sur le territoire de l’île, est une topographie poétique, conceptuelle et lumineuse du lieu. In situ, je recueille des os de gabians en scrutant le sol et les interstices des roches où ils viennent mourir. Les os, moulés puis coulés en céramique, sont disposés et font office de cales ; ils maintiennent le cube en légère lévitation, recréant ces interstices et appelant à une attention à nos cohabitations avec d’autres vivant·e·s. Sans titre, 2022. Veilleuses électriques, multiprises, dimensions variables. À la façon d’un microbiote, des veilleuses en forme de champignons se multiplient sur les prises électriques de l’espace, ajoutant une touche singulière à l’environnement. Ces objets, à la fois séduisants et rassu- rants, exercent également leur impact de manière virale. L’œuvre évoque également l’univers de l’enfance, où le monde imagi- naire semble veiller sur les spectateur·rices qui viennent s’y pencher. Sans titre, 2021. Chips 3D, 35 cm x 2,50 cm. Sans titre, 2022. Manteau, cornes de vache, métal, 100 cm x 150 cm. Cette installation découle d’un assemblage d’objets. En raison de leur nature expressive et métaphorique, la pièce va au-delà du contenu concret ou sémantique des objets qui la com - posent. Elle change de statut et s’ouvre à une multiplicité d’interprétations. Chacune de ces interprétations engendre potentiellement une œuvre différente Sans titre, 2021. Oranges, papiers d’agrumes, dimensions variables. Cette installation est la réactivation d’un sou- venir d’enfance. Les papiers d’agrumes sont ajustés autour des oranges pour ressembler à des tortues. Ce geste très simple permet de détourner la fonction première de l’orange. Elles forment ainsi un troupeau mobile, dont la configuration peut être modifiée par les spec - tateur.ice.s. Une invitation pour les regardeur. euse.s à manipuler l’espace d’exposition. For sculpture to happen, 2021. distribution. Dans le prolongement de ma réflexion, je crée ma propre boîte de chewing-gum afin de pouvoir réaliser mes propres sculptures, uniques et malléables, dans le but de les offrir aux autres qui, de fait, participent à leur création. L’œuvre consiste en une distribu- tion de chewing-gum. Les spectateur.ice.s mâchent et réalisent des sculptures tout en rumination Calcite, 2023. Appel à projet Prix Dior de la Colle Noire. Au printemps dernier, j’ai participé et été nominée pour l’appel à projet Prix Dior de la Colle Noire 2023. Dans ce cadre j’ai réali- sé « Calcite », oeuvre sur-mesure et évolu- tive destinée à être installé au château de la Colle Noire, à Grasse. « J’ai souhaité scinder des pierres calcaires présentes sur le site et recouvrir la partie plane ainsi créée d’une surface miroitante, orientée de manière à refléter le sol. Les pierres se fondent dans le paysage, semant un trouble dans la perception qui a interpel - lé le promeneur. En s’approchant, et grâce à la réflexion, il verra se miroiter le spectacle du vivant à ses pieds. Un lieu habituelle- ment piétiné est devenu le théâtre de la vi- vacité des non-humains. » 06 42 90 04 01 louise.cvlls@gmail.com @louise_covillas