21-02-06 1 EN GUISE D’INTRODUCTION « En crachant délibérément sur l’objectif, en le sabotant et le détournant de son emploi, on peut obtenir des effets comparables à ceux de l’ impressionnisme à ses débuts . On peut alors donner à la performance de cette prima donna des capacités surprenantes rien qu’en accélérant la vitesse du moteur, ou bien on peut casser le rythme, pour se rapprocher au mieux de l’ inspiration du mouvement tel qu’il est aujourd’hui perçu par l’homme contemporain, en le ralentissant pendant que l’image est en cours d’enregistrement. On peut même s’approprier la caméra et recevoir en héritage l’espace de galaxies. On peut surexposer le film, le sous-exposer, utiliser tous les filtres disponibles, des brouillards, des rideaux de pluie, des éclairages déséquilibrés, des néons de couleurs glaciales, névrotiques, un type de verre qui n’est absolument pas conçu pour la réalisation de films, ou même un verre conforme mais que l’on utilise au contraire des recommandations de son fabriquant – on peut aussi prendre des clichés une heure après le lever du soleil ou une heure avant son coucher (ce sont des heures merveilleuses, taboues, mais les labos de développement ne vous en garantiront jamais le résultat) –, on peut également employer pendant la nuit un film qui est explicitement conseillé pour le jour ou faire exactement le contraire . » Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 22. 1 MATIÈRE Ø Première capsule ü Bibliographie ü Présentation ü L’œil interne ü Métaphores et vision (1964) ü Le cinéma lyrique Ø Deuxième capsule ü Le film lyrique du quotidien ü Le film de naissance ü La réception d’un · e co-auteur · e ü À la défense de l’amateur (1967) Ø À faire ü Blocs 1 à 3 ü Bloc complémentaire Source : artspotting.tumblr.com 2 BIBLIOGRAPHIE 3 BRAKHAGE, Stan, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, 128 pages. BRAKHAGE, Stan, « In defense of amateur », dans Essential Brakhage. Selected writings on filmmaking by Stan Brakhage McPherson & Company (Coll. Documentext ), Kingston, 2001, pp. 142-150. NICHOLS, Bill, Introduction to documentary , Indiana University Press, Bloomington, 2001, 228 pages. ODIN, Roger , De la fiction , De Boeck Université, Bruxelles, 2000, 183 pages. SITNEY, P. Adams, « Le cinéma lyrique », dans Le Cinéma visionnaire – L’avant-garde américaine (1943-2000) , Éditions Paris Expérimental (Coll. Classiques de l’avant-garde), Paris, 2002, pp. 155-184. VERGÉ, Émilie, Stan Brakhage : Catalogue raisonné , Éditions Paris Expérimental (Coll. Outils / Tools), Paris, 2016, 442 pages. 21-02-06 2 PRÉSENTATION Crédit : Friedl Kubelka Stan Brakhage, né James Stanley Brakhage le 14 janvier 1933 à Kansas City, dans l’État du Missouri, et décédé à Victoria, en Colombie-Britannique, le 9 mars 2003, fut l’un des cinéastes d’ avant-garde les plus influents de sa génération et maître d’œuvre de plus de 300 réalisations filmiques ( Brakhage lui-même a toujours préféré cette appellation à celle, plus traditionnelle, de « film » ), toutes produites en format pellicule de 1952 à 2003. Comme l’indique l’historien P. Adams Sitney, c’est à lui seul que revient en effet l’émergence du cinéma lyrique 1 . Influencé qu’il était par la poésie moderniste américaine ainsi que par l’ expressionnisme abstrait , tel que l’a surtout pratiqué Jackson Pollock jusque dans les années 1950, Brakhage a néanmoins dédié sa vie à la conquête d’un cinéma pur , libéré de tout carcan que lui imposeraient d’autres formes artistiques. P. Adams Sitney, Le cinéma visionnaire – L’avant-garde américaine (1943-2000) , Paris, Éditions Paris Expérimental (Classiques de l’avant-garde), Paris, 2002, p. 155. 4 PRÉSENTATION 5 Source : facets.org Ø Thèmes de prédilection ü La naissance ü La sexualité ü La mort ü La quête de Dieu « Même si Maya Deren s’incline devant l’appareil cinématographique et loue la capacité de celui-ci à reproduire la réalité, Brakhage en dénonce les manipulations idéologiques et incite les cinéastes à s’insurger contre ces normes mécaniques ou optiques de façon à évaluer ce que l’on peut appeler l’ expérience visuelle d’un réalisateur . » P. Adams Sitney dans Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 10. L’ŒIL INTERNE « Imaginons un œil qui ne sait rien des lois de la perspective inventées par l’homme, un œil qui ignore la recomposition logique , un œil qui ne correspond à rien de bien défini, mais qui doit découvrir chaque objet rencontré dans la vie à travers une aventure perceptive . [...] Imaginons un monde vivant, peuplé de toutes sortes d’objets incompréhensibles, tremblant dans d’inexplicables et interminables variations de mouvements et de couleurs . Imaginons le monde d’avant "Au commencement était le verbe" » 1 Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 19. Ø Écriture du mouvement sur la pellicule ü Langage écarté (la connaissance est autre) ü Communication visuelle ü Perte de la fonction reproductive de la caméra ü Vision sans pensées (confusion d’images) ü À la recherche de l’ambiguïté Ø Quête d’un cinéma pur ü Large place laissée à l’improvisation... ü ... et aux expérimentations Source : film- makerscoop.com 6 21-02-06 3 L’ŒIL INTERNE « Mon œil, tenant de se régler sur l’imaginaire , utilisera toutes les fréquences lumineuses à sa portée. J’écris en connaissance de cause, je sais que mon œil interne reçoit toutes les vibrations qui lui sont adressées. » Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 27. Ø Similitudes avec l’expressionnisme abstrait (la Danse de la Poésie) : « J’ai sur le champ abandonné l’écriture de scénarios, considérant le littéraire comme une entrave , et en suis venu directement à danser de la sorte avec mes visions pour faire œuvre créatrice de l’image en mouvement, dont je serais le médium (et même mon propre médium), moins bousculé par les déplacements, plus inspiré par tous les travaux provenant d’ autres domaines artistiques . De nouveau, je me suis appliqué à présenter toutes ces diverses approches de l’art poétique de façon à expliciter ce que j’entends précisément définir par la notion de "mouvement en tant que sens" [move meant ] . » Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 41. 7 Source : whitechapelgallery.org MÉTAPHORES ET VISION (1964) Dès le début de son ouvrage, Brakhage nous convie dans son univers aussi habilement qu’il laisse justement s’insinuer en lui le monde vivant , lorsque, caméra 16 mm en main, il se lance à la poursuite de l’aventure perceptive : « quand l’ équilibre se fait entre ce que nous voyons et ce qui nous est présenté 1 . » Cet œil dont il fait mention guidera toute sa vie sa pratique cinématographique et son approche du réel Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 44. 8 Ø Thèse : Le refus de nommer les choses permet de recouvrir la vision. Ø Question initiale : « Combien existe-t-il de couleurs pour l’œil d’un bébé à quatre pattes sur la pelouse et qui ne connaît rien du concept de "Vert" » ? Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 19. Ø Forme du texte ü Jeux de mots (importance de la majuscule et autres signes typographiques) ü Construction du langage : schémas, gribouillis et ratures ü Longues phrases, peu de ponctuation et chapitres inexistants (flot) LE CINÉMA LYRIQUE 9 Ø Films importants ü Anticipation of the Night (1958) ü Dog Star Man (1961-1964) ü Mothlight (1963) Ø Possibilités du matériau (bande de celluloïd) ü Se prête à des transformations allant au-delà de celles prévues par un usage normal ü Films pas que conçu pour la projection, mais pour être aussi tenus à la main ü Rapport au temps : 24 images / secondes OU 16 images / secondes « On voit ce que le cinéaste voit ; les réactions de la caméra et le montage sont révélateurs de ses réponses à sa vision. Au début de Meshes of the Afternoon [film de transe] d’ Hammid et Deren se trouvent les racines du cinéma à la première personne [...]. Mais immédiatement cette puissante ouverture est tempérée – ou médiatisée – en montrant le visage de la protagoniste dans les séquences successives. En créant le cinéma lyrique, Stan Brakhage accepta les limites de cette séquence d’ouverture comme base pour une nouvelle forme En jouant sur les effets d’optiques et les métaphores des mouvements corporels par la gestuelle de la caméra, il affirme le rôle du cinéaste comme première personne lyrique . » P. Adams Sitney, Le Cinéma visionnaire – L’avant-garde américaine (1943-2000) , Éditions Paris Expérimental (Coll. Classiques de l’avant-garde), Paris, 2002, pp. 329-330. 21-02-06 4 LE CINÉMA LYRIQUE 10 Ø Corps caméra : « Par d’amples et rapides mouvements, elle [la caméra] tente de scruter l’espace , ou de le happer, de le brosser au moyen d’incessants déréglages de ce qui en cinéma est une "norme optique" : le point, la lumière. Chaque plan se transforme alors en décharge d’énergie Désormais, Brakhage consacrera ses films à son entourage [acteurs sociaux 1 ] et à son environnement le plus immédiat : sa femme [Jane Collom ], ses enfants, leur maison dans la montagne, faisant d’ évènements personnels et intimes (naissance, amour, mort, etc.) le sujet de ses œuvres à venir. » Jean-Michel Bouhours dans Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 5. 1 Bill Nichols, Introduction to documentary , Indiana University Press, Bloomington, 2001, p. 5. Source : colorado.edu À faire - BLOC 1 Ø À visionner « Stan Brakhage | The Untutored Eye » – Elliott Nunn , 2017, 10 min. 31 sec. « The innocent eye is a myth and we cannot ever regain this stage, but Brakhage’s works allow us to revisit it , if not just for a moment. » (09:45) Ø À lire VERGÉ, Émilie, « Stan Brakhage, cinéaste artiste » dans Stan Brakhage : Catalogue raisonné , Éditions Paris Expérimental (Coll. Outils / Tools), Paris, 2016, pp. 49-70. 11 Source : colorado.edu LE FILM LYRIQUE DU QUOTIDIEN Loin des intentions égoïstes et narcissiques que certains critiques du cinéma lui ont longtemps prêtées, la manière avec laquelle Brakhage a montré sa vie privée à l’écran correspond à un souhait pleinement assumé d’une portée allant bien au-delà d’une réception strictement familiale : « J’ai commencé à comprendre que toute l’histoire, toute la vie, tout le matériel pour travailler, devait venir de moi [...] et je pensais que le plus personnel ou égocentrique j’étais, le plus loin j’aurais pu aller et atteindre encore mieux ces intérêts universels qui sont en chaque homme 1 », explique-t-il en entrevue. P. Adams Sitney , « Pour présenter Stan Brakhage... » dans Les cahiers de Paris Expérimental , nº 1, Éditions Paris Expérimental, Paris, 2001, p. 30. Film de famille (le fond) + Intervention expérimentale (la forme) 12 Source : colorado.edu 21-02-06 5 LE FILM LYRIQUE DU QUOTIDIEN Ø Film de famille (axe communicationnel) : « La seule chose qui importe est que l’objet ou l’événement en question ait été jugé digne, par celui qui tient la caméra, de figurer dans la collection des souvenirs familiaux . » ODIN, Roger, Rhétorique du film de famille dans « La revue d’esthétique », vol. 32, nº 1-2, Union générale d'éditions, Paris, 1979, pp. 346. « On ne voit pas bien [...] à quel titre le film de famille pourrait mériter de retenir l'attention : dévalorisé par sa trop grande quotidienneté , pratiqué comme une simple distraction par des gens qui ignorent tout des règles du 7 e Art, il apparaît à la fois comme vide, futile et mal fait . » ODIN, Roger, Rhétorique du film de famille dans « La revue d’esthétique », vol. 32, nº 1-2, Union générale d'éditions, Paris, 1979, pp. 341. 13 Ø Figures de rupture et d’agression du film familial : déphasage monstratif ü L’absence de clôture (exception faite des mentions écrites / gravées de Brakhage) ü La discontinuité temporelle ü La localisation et l’indifférenciation spatiale ü Les sautes et l’expression par fragments ü L’émiettement narratif ü Les flous, bougés, filés et zoomings ü L’adresse à la caméra (intervention des acteurs sociaux) LE FILM LYRIQUE DU QUOTIDIEN 14 Ø Altération du médium : déphasage externe (déterminations institutionnelles) ü La forme-mouvement et le découpage des séquences ü La répétition et la surimpression ü La kaléidoscopisation du monde Ø Intervention expérimentale (axe spectatoriel ) : « [...] la spécificité de cet espace se manifeste avant tout sur l’axe du Sujet : alors que le cinéaste familial répond à un simple vouloir faire du souvenir de famille , que le cinéaste amateur manifeste un vouloir faire du cinéma ou un vouloir faire pro , le cinéaste de cet espace [expérimental] est animé par le désir de s’exprimer par le cinéma : en bref, c’est un véritable amateur au sens "noble du terme" , un "amoureux de l’expression cinématographique", quelqu’un "qui a quelque chose à dire, à communiquer aux autres, celui qui ne vise pas les louanges de chapelle, qui ose ". » Raymond Lefèvre dans Roger Odin, La question de l'amateur dans « Communications 68 : le cinéma en amateur », Éditions du Seuil, Paris, 1999, p. 47-89. Source : offscreen.com LE FILM LYRIQUE DU QUOTIDIEN Sous-genre cinématographique intrinsèquement marqué par la nostalgie des détails évanescents du quotidien et par la confrontation du cinéaste avec les expériences que lui dicte la vie , le film lyrique du quotidien se targue d’exposer ce qu’une vision plus conservatrice du cinéma considèrerait ne pouvant l’être. Grâce à un montage misant sur des concordances thématiques plutôt que sur la représentation organisée d’un temps séquentiel, le cinéaste propose de libérer, non sans nuances et contradictions, une sensibilité lumineuse se voulant le reflet de son intériorité 1 P. Adams Sitney, Le cinéma visionnaire – L’avant-garde américaine (1943-2000) , Éditions Paris Expérimental (Classiques de l’avant- garde), Paris, 2002, pp. 159-160. 15 Ø Caractéristiques ü Structure narrative faite de trous et de blancs (rêveries) ü Création continue (sans ratures ni retouches) ü Mémoire spontanée du réel équivalente à l’expérience vécue ü Rythme soutenu par l’état d’esprit fluctuant du cinéaste ü Innocence du cinéaste devant l ’insaisissable Nature Plus que pour tout autre genre, la relation entre fond et forme est ici primordiale. 21-02-06 6 LE FILM LYRIQUE DU QUOTIDIEN / À faire - BLOC 2 Ce que privilégie Brakhage avec sa caméra 16 mm, dirigée par les visions que lui dicte son œil interne, correspond tout à fait à cette volonté de s’approprier perceptiblement le réel ou – comme nous devrions plutôt le formuler – de s’en rapprocher suffisamment pour en provoquer la rencontre et en permettre la symbiose. 16 Ø À visionner Wedlock House: An Intercourse (Stan Brakhage, États-Unis, 1959, 10 min. 47 sec.) Window Water Baby Moving (Stan Brakhage, États-Unis, 1959, 12 min. 11 sec.) Source : sensesofcinema.com LE FILM DE NAISSANCE 17 Source : tasteofcinema.com « Dans aucun autre film [que Window Water Baby Moving ] Brakhage n’a autant réorganisé le temps chronologique ; pour la plupart, ses films lyriques existent en dehors de toute temporalité séquentielle dans un royaume de simultanéités ou de courts espaces temporels d’évènements isolés et séparés. » SITNEY, P. Adams, Le Cinéma visionnaire - L’avant-garde américaine (1943-2000) , coll. Classiques de l’avant-garde, Éditions Paris Expérimental, Paris, 2002, p. 168. Ø Window Water Baby Moving (1959) ü Capture du quotidien poussée au paroxysme ü Monstration de l’intime et de l’obscène ü Présentation chronologique... ü ... malgré montage plastique alternant passé, présent et futur (montage rythmique) ü Jeu combiné et réciproque entre Jane et Stan (bris du quatrième mur) LE FILM DE NAISSANCE Ø Acteurs sociaux : « For non-fiction, or documentary [...] "people" are treated as social actors : they continue to conduct their lives more or less as they would have done without the presence of a camera. They remain cultural players rather than theatrical performers . [ ... ] Their value resides not in the ways in which they disguise or transform their everyday behaviour and personality but in the ways in which their everyday behaviour and personality serves the needs of the filmmaker . » Bill Nichols, Introduction to documentary , Indiana University Press, Bloomington, 2001, p. 5. « Il y a un jeu combiné entre le cinéaste et sa femme [Jane Collom ] dans Window Water Baby Moving absent de Thigh Line Lyre Triangular . L’apogée poétique de ce jeu combiné arrive vers la fin du film au moment où l’on aperçoit le visage bouleversé de Brakhage juste après la naissance de l’enfant. Sa femme, encore sur la table de travail, lui prit la caméra des mains pour obtenir ces plans. Auparavant, ils s’étaient filmés réciproquement l’un l’autre pendant une dispute et Brakhage avait intercallé des images en négatif d’eux faisant l’amour dans le film Wedlock House : An Intercourse (1959). » SITNEY, P. Adams, Le Cinéma visionnaire - L’avant-garde américaine (1943-2000) , coll. Classiques de l’avant-garde, Éditions Paris Expérimental, Paris, 2002, p. 168. 18 21-02-06 7 À faire - BLOC 3 19 Ø À visionner Mothlight , (Stan Brakhage, États-Unis, 1963, 3 min. 13 sec.) The Dante Quartet (Stan Brakhage, États-Unis, 1987, 6 min. 03 sec.) BRAKHAGE, Stan, « In defense of amateur », dans Essential Brakhage. Selected writings on filmmaking by Stan Brakhage McPherson & Company (Coll. Documentext ), Kingston, 2001, pp. 142-150. Source : nybooks.com Ø À lire BRAKHAGE, Stan, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, 128 pages (extraits choisis). ü p. 27-36 : œil interne / expériences lumineuses ü p. 42-46 : domaine du désir (impression / inspiration) ü p. 54-59 : magie / dédoublement / réception ü p. 67-73 : scénario (liter-réalisation) ü p. 85-90 : notes manuscrites LA RÉCEPTION D’UN · E CO-AUTEUR · E Ø Déphasage monstratif (du film de famille) : trop grande autonomie de la monstration par rapport à la narration. Le film est alors difficile de structurer en un récit cohérent. Ø Déphasage externe (du film expérimental) : effet de déphasage généralisé pouvant devenir « l’un des plus grands motifs de plaisir pour les amoureux de ce type de productions » ou, au contraire, une source d’agacement et de frustration devant le spectateur souhaitant fictionnaliser ODIN, Roger, De la fiction , De Doeck Université, Bruxelles, 2000, p. 43. 20 Source : hambrecine.com « Certains films expérimentaux cherchent volontairement à produire un effet de déphasage généralisé. Si ces films sont vus dans un cadre institutionnel approprié (une séance de cinéma affichée comme une projection de films expérimentaux) et par des spectateurs avertis, le déphasage sera connoté positivement [...]. » ODIN, Roger, De la fiction , De Doeck Université, Bruxelles, 2000 , p. 43. LA RÉCEPTION D’UN · E CO-AUTEUR · E « [...] à la recherche délibérée de l’ambiguïté ; j’espère remettre ainsi en question la rigidité de toute affirmation langagière – je sais que seule l’ immortelle poésie peut nous permettre d’échapper à cette confiance absolue qui réside en la croyance qu’un mot [ word ] est un monde [world] obéissant à une finalité dépourvue de sens. » Stan Brakhage, Métaphores et vision , Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1998, p. 31. 21 Ø Fictionnalisation : mode [...] mobilisé à la production ou à la lecture d’un texte comme d'un texte de fiction et qui conduit à faire vibrer les actants [lecteur et réalisateur] « au rythme des évènements fictifs racontés ». ODIN, Roger, De la fiction , De Doeck Université, Bruxelles, 2000, p. 11 Ø L’effet fiction : expérience vécue par l’actant-lecteur et souhaitée par l’actant-réalisateur, tributaire du mirage Source : filmaffinity.com 21-02-06 8 LA RÉCEPTION D’UN · E CO-AUTEUR · E 22 Ø La production de sens et d’affects par la fictionnalisation ü En réponse au déphasage monstratif du film de famille • Diégétiser – Figurativiser : l a diégèse à reconstituer – Effacer le support : la disparition du photogramme – Construire un espace habitable : le hors champ animé du punctum • Narrativiser – L’absence de bande-son et le « sous-titrage » de la structure à trous – L a lecture plurielle (production fantasmatique collective) – La revanche sur le vécu et l’embellissement du passé ü En réponse au déphasage externe du film expérimental • Accepter les déterminations institutionnelles du genre (vs cinéma de fiction) – Les i mages non figuratives – La (dé)construction du mouvement – Les i mages produites autrement (vs reproduction mécanique du réel) En résumé Déphasage è Fictionnalisation è Effet fiction À LA DÉFENSE DE L’AMATEUR (1967) Si le film lyrique du quotidien parvient aussi bien à se démarquer des conventions du cinéma narratif traditionnel, c’est finalement grâce à la communion entre film familial et film expérimental dont il émerge. Le rapprochant ainsi davantage du champ cinématographique amateur , le métissage des formes dont il découle octroie à ce type de cinéma d’avant-garde un statut prisé au sein des communautés d’interprétations qui veulent bien lui réserver une place dans leur programmation. Bien que le propos du film lyrique du quotidien nous provienne de ce que le cinéma a de plus banal, mais aussi de plus pur à offrir (soit une certaine vision du réel ), c’est surtout contre son propos largement poétique et difficile à saisir – presque autant que le fut le réel pour le cinéaste ? – que se butte tout public y prêtant un œil. Même avisé des conventions du sous-genre , le plus tenace et expérimenté des publics ne parviendra qu’à percer la coquille lyrique du quotidien que s’il s’en approprie complètement, à la manière d’ un · e co- auteur · e qui signerait aussi son nom sur l’œuvre reçue, produite. « L’amateurisme est une sorte d’art de vivre libérateur car il met l’accent sur la production de l’œuvre et non sur l’œuvre comme produit. » Roland Barthes, « Roland Barthes par Roland Barthes » dans Œuvres complètes IV , Seuil, Paris, 2002, p. 206. 23 À faire - BLOC COMPLÉMENTAIRE 24 Ø À lire ALLARD, Laurence, « Une rencontre entre film de famille et film expérimental : le cinéma personnel » dans Le film de famille : usage privé, usage public sous la direction de Roger Odin , Éditions Meridiens Klincksieck , Paris, 1995, pp. 113-125. BRAKHAGE, Stan, « Manuel pour prendre et donner les films » dans Les Cahiers de Paris Expérimental , Éditions Paris Expérimental, nº 14, Paris, 2002, 40 pages. Source : imdb.com Ø À visionner « Stan Brakhage: I wanted to make a poem » – Optic Nerve Ltd, 2015, 08 min. 30 sec. « Stan Brakhage Walker Dialogue with Bruce Jenkins » – Walker Art Center, 2020, 1 heure, 30 min. 55 sec. Ø À visiter Stan Brakhage on the Web (site de Fred Camper)